Mauvaise gestion médiatique des garanties “pertes d’exploitation”, soutien à l’économie difficilement lisible, rivalités commerciales étalées en plein jour… La crise du Covid-19 a profondément écorné l’image de l’assurance dans l’opinion publique.
En terme d’image, l’assurance se remettra-t-elle de la crise du Covid-19 ? Difficile à dire, mais, en terme de communication, la crise sanitaire restera comme un violent échec pour tout le secteur.
Une très mauvaise gestion médiatique de la garantie “pertes d’exploitation”
La première et principale pomme de discorde est la garantie “pertes d’exploitation”. Dès le début du confinement, les entreprises victimes de fermetures administratives ont voulu faire jouer cette garantie. Le régulateur des assurances a récemment confirmé que 93% de ces contrats ne couvraient pas le risque du Covid-19. L’absence d’indemnisation était donc le plus souvent légitime.
Mais la filière n’a pas réussi à faire passer sereinement ce message. D’autant que plusieurs assurances ont refusé en bloc toute indemnisation, même pour des contrats l’autorisant. Plusieurs restaurateurs ont dû attaquer leur assureur en justice pour obtenir gain de cause. Avec de médiatiques victoires à la clé.
Le déficit d’image a été considérable : les assureurs “ont commencé par se taire, pour ensuite dire que si on remboursait les pertes, l’assurance serait ruinée. Expliquer ça à des gens déjà ruinés, ça ne porte pas. En termes d’image, c’est désastreux”, expose une source proche du secteur. “Clairement nos explications au début auraient dû être moins techniques et plus claires”, a d’ailleurs reconnu Jean-Laurent Granier, patron de Generali France.
Quand les rivalités commerciales minent l’unité du secteur
Pour ne rien arranger, le secteur de l’assurance a peiné à tenir un discours unique sur la crise. Certains assureurs ont profité de la situation pour verser des primes exceptionnelles à leurs assurés. Le Crédit Mutuel et la Macif, tout en informant qu’ils ne pouvaient pas faire jouer la garantie “pertes d’exploitation”, ont annoncé à grand renfort de communication qu’ils verseraient 250 millions d’euros à leurs clients professionnels. Pour certains analystes, il s’agissait d’une pure stratégie commerciale, destinée à dissimuler des contrats peu clairs et sujets à contestation judiciaire.
La Maif, elle, a décidé de rembourser 100 millions à ses sociétaires pour faire suite à la baisse de la sinistralité automobile. En décalage complet avec la ligne générale du secteur, qui attendait la fin de l’année pour tirer le bilan de cette sinistralité et son impact éventuel sur les primes 2021. Ces initiatives “créent l’idée que tous les assureurs pouvaient payer, c’est malhonnête”, s’énerve un autre assureur.
“On sort de cette crise avec une image déplorable”
“Il va y avoir des traces. Il reste des points de frictions assez importants entre bancassureurs et assureurs traditionnels. Je ne sais pas comment ça peut évoluer dans le temps”, s’inquiète un dirigeant du secteur.
“On sort de cette crise […] avec une image déplorable” alors qu’“on a donné pour le pays” et qu’“on a été touché par des sinistres considérables”, expose un dirigeant français d’assurance. En effet, le secteur a versé deux fois 200 millions d’euros au plan de solidarité gouvernemental, puis a annoncé 1,5 milliard d’euros d’investissements exceptionnels dans les entreprises françaises. Ainsi que près de 2 milliards d’euros d’aides individuelles fournies par chaque assureur. Un soutien rendu inaudible par une communication défaillante. Les efforts pour réparer l’image du secteur dans l’esprit des Français risquent d’être très importants.